Conception des capteurs d’ambiance
Les défis méconnus de la conception des capteurs d’ambiance
Bien que leur rôle soit très souvent sous-estimé, les capteurs d’ambiance font partie intégrante des systèmes de CVC. Peu de gens savent à quel point la création d'un appareil capable de mesurer la bonne température - au dixième de degré près - en fonction des conditions extérieures, demande beaucoup de préparation et de travail. Sebastian Eberle, chef du développement de la technologie de détection des conditions ambiantes, et Yoram Mottas, ingénieur de systèmes, développement de capteurs,
tous deux de Belimo, parlent des défis associés à ce domaine d’application et de la manière dont l’entreprise utilise des solutions innovantes pour les surmonter et fournir des capteurs d’ambiance rapides et précis.
Conditions de travail exigeantes
Les êtres humains ne peuvent se sentir à l'aise que dans une "plage étroite de leur environnement". Il ne doit pas faire trop chaud ou trop froid - aussi surprenant que cela puisse paraître, de nombreuses personnes sont capables de distinguer des variations de température de ±0,5 °C - et l'humidité relative doit être juste ce qu'il faut (Image 1). Cela met donc une très forte pression sur les systèmes de CVC, car la plupart des capteurs haute performance offrent une précision de ±0,2 °C. Il ne reste plus qu’une marge d’erreur de ±0,3 °C pour concevoir un capteur d’ambiance capable de répondre aux exigences de confort et de respecter les normes industrielles.
Image 1
Plage de température et d'humidité dans laquelle les personnes se sentent à l'aise. (Illustration par le professeur. Wolfram Frank, titulaire de la chaire de mécanique des fluides et professeur émérite à la faculté des sciences naturelles et de la technologie de l’université de Siegen, en Allemagne)
Essai et compensation
Comprendre quel mécanisme de transfert de chaleur – conduction, convection ou rayonnement – est responsable d’un phénomène spécifique peut aider à orienter les ingénieurs dans la bonne direction. Ce type d’essai exige une régulation très précise des paramètres d’ambiance à l’aide d’une installation telle que celle illustrée sur l’image 2.
Image 2
Plage de température et d'humidité dans laquelle les personnes se sentent à l'aise. (Illustration par le professeur. Wolfram Frank, titulaire de la chaire de mécanique des fluides et professeur émérite à la faculté des sciences naturelles et de la technologie de l’université de Siegen, en Allemagne)
Mesurer la température avec une telle précision n’est déjà pas facile, mais si on ajoute des facteurs externes tels le débit d’air, l’humidité, les sources de chaleur et les variations de tension qui peuvent nuire à la lecture des températures, la tâche est encore plus compliquée. De plus, la valeur mesurée doit représenter la température au milieu d’une pièce alors que le capteur est installé au mur. Puisque les fabricants de capteurs n’ont pas leur mot à dire quant à la façon dont ils sont installés, c'est encore plus compliqué, car les appareils doivent être conçus de façon à ce que ce paramètre supplémentaire ne fausse pas les lectures.
La pièce d’essai dans laquelle se trouve le capteur est alimentée par un débit d’air constant et laminaire qui peut être régulé avec précision de 0,05 m/s à 0,3 m/s, imitant ainsi un environnement intérieur. Cet appareil est ensuite placé dans un boîtier isolé thermiquement capable de réguler la température avec une précision de 0,1 °C. Puisque le débit d’air à l’intérieur du boîtier est plus élevé que celui à l’intérieur de la pièce d’essai, la température souhaitée peut être atteinte (ou modifiée) très rapidement. Cette installation permet également de réguler des paramètres tels que l’humidité et la tension d’alimentation, offrant ainsi un outil puissant pour créer un profil de calibration détaillé et pour évaluer séparément les contributions de chaque mécanisme d’échange de chaleur.
Conception éclairée
Les nombreuses données recueillies lors du banc d’essai peuvent être intégrées à la conception du capteur afin de maximiser ses performances, en réduisant l’impact du rayonnement et en éliminant l’auto-échauffement. Par exemple, l’essai a démontré que l’optimisation de la conception des purgeurs d’air du boîtier pouvait améliorer l’interrelation entre l’élément sensible et la température réelle de la pièce. On peut encore plus l’optimiser en modifiant la forme et la position des canaux de circulation de l’air à l’intérieur de l’appareil.
Une autre considération importante lors de la conception des capteurs de température ambiante est que les mesures ne doivent pas être affectées par la chaleur générée par les composants électroniques à l’intérieur de l’appareil lui-même. Il faut donc des stratégies d’isolation de l’élément sensible sans affecter le facteur de forme de la conception globale. La carte de chaleur de l’image 3 illustre une approche permettant d’atteindre cet objectif.
Image 3
Carte de chaleur montrant les variations de température de la carte de circuit imprimé d’un capteur.
La carte de circuit imprimé (PCB) du capteur est composée de deux sections physiquement séparées et reliées par de minces supports. La partie inférieure contient l’élément sensible, tandis que la partie supérieure renferme les composants électroniques tels que le microcontrôleur et la source d’alimentation, qui dégagent de la chaleur en fonctionnement normal. Comme on peut le voir, cette zone du circuit imprimé est beaucoup plus chaude que la partie contenant l’élément sensible. La conducteur empêche la chaleur d’affecter l’élément sensible grâce à la séparation physique, aux petits supports et au fait que les plaques de masse en cuivre des deux circuits ne sont pas connectés. Puisque le cuivre conduit très bien la chaleur, il permet de réduire considérablement les effets d’auto-échauffement.
Bien que de nombreux problèmes puissent être réglés au cours de la phase de conception, il existe toujours des facteurs externes qui échappent au contrôle d’un fabricant, tels que le débit d’air, l’humidité, les différentes sources de chaleur et les alimentations électriques variables. Ce dernier point, par exemple, est réglé par une mesure interne en temps réel et un algorithme de compensation. Toutefois, si l’on se fie trop à la compensation, l’appareil risque d’être moins sensible et de réagir plus lentement.
Résumé
Les capteurs d’ambiance doivent répondre à de nombreuses exigences. Ils doivent être précis, rapides et adaptés à une utilisation partout dans le monde et à une multitude d’utilisations. Cela nécessite une définition minutieuse lors de la conception de l’appareil afin d’éliminer les sources d’erreur internes potentielles, tout en compensant les fluctuations externes inévitables. Cet article n’a abordé que les difficultés liées aux mesures de température, et n’a même pas évoqué le monitoring et la régulation d’autres paramètres nécessaires pour assurer le confort et la sécurité des espaces intérieurs, tels que l’humidité, les niveaux de CO2, la matière particulaire ou les composés organiques volatils. Nous espérons qu’il a tout de même permis de mettre en évidence la complexité de la création d’un capteur de température ambiante haute performance et que cet appareil, souvent négligé, sera apprécié à sa juste valeur.
Sebastian Eberle, chef du développement de la technologie de détection des conditions ambiantes
Yoram Mottas, ingénieur de systèmes, développement de capteurs